•  Il y a quelques années, un aveugle a déménagé dans mon immeuble. Dès les premières fois où je l'ai croisé, à l'entrée de l'immeuble ou dans la rue, il m'a fait une grande impression. Déjà, évidemment, il était aveugle : et pour la jeune personne que j'étais alors, c'était impressionnant, un aveugle. Je n'avais dû en voir que deux ou trois fois dans ma vie à ce moment-là, aussi la cécité me paraissait-elle être quelque chose d'exceptionnel, et le fait que ce nouveau voisin en soit doté lui conférait tout de suite une aura particulière. La cécité n'est pas un handicap comme les autres. Les aveugles ne sont pas privés d'une capacité quelconque, ils sont privés d'un sens, peut-être le plus éthéré de tous : ce qui ne les touche pas, ce qui ne parvient pas jusqu'à eux, ils ne peuvent le percevoir. Comme le monde doit sembler grand, quand il n'y a autour de soi que l'immédiate proximité, et, derrière, la confusion, l'inconnu, le néant, le vide immense et noir ! Car avec la vue, c'est aussi un horizon et un rapport au monde qu'il ne leur est pas donné d'avoir. Cela est même sans doute plus particulièrement marqué chez les aveugles de naissance, qui ne peuvent même pas concevoir ce dont ils sont privés, et vivent dans une obscurité éternelle. Je ne sais pas si l'aveugle de mon immeuble était aveugle de naissance ou non, mais toujours est-il qu'il était aveugle, et que cela m'impressionnait beaucoup. C'est difficile de se représenter la vie d'un aveugle, mais chaque essai m'a menée à la conclusion qu'il fallait développer beaucoup d'attention aux choses et un certain nombre de talents qu'on ne pouvait pas apprendre autrement qu'en étant aveugle. La cécité fait de vous presque un (super-)héros. Et le mien, ou plutôt celui de mon immeuble, était mon héros personnel.

     Car il n'était pas seulement aveugle : il était aussi jeune. Il devait avoir quelque chose comme vingt-cinq ans, la trentaine tout au plus. Les rares aveugles que j'avais croisés dans la rue jusque-là étaient terriblement âgés, cumulant rides et blancheur des cheveux : aussi, la jeunesse de cet aveugle, fût-elle en réalité quelque chose de tout à fait banal (car après tout, tous les aveugles ont déjà été jeunes), me paraissait d'une nouveauté rafraîchissante. Elle apportait, au sens propre du terme, un petit coup de jeune à la catégorie des aveugles. C'était la preuve que la cécité n'était pas forcément liée à l'inertie ou l'apathie que j'avais pu lire auparavant sur les visages des aveugles que j'avais croisés. L'aveugle de mon immeuble était jeune, et il incarnait l'énergie qu'on aime donner à la jeunesse : il était mince, vif dans sa façon de se mouvoir, et il souriait tout le temps. Surtout, il avait toujours l'air détendu, et de ce que je percevais, il était heureux, peut-être même joyeux. Il était aussi noir (ou tout du moins métisse), et comme il portait des lunettes noires elles aussi, je crois que ça contribuait à faire de lui le cliché du mec afro-américain cool qu'on voit parfois dans les films.

     Cool, c'était vraiment le mot pour définir son attitude, son aura, l'image que je me faisais de lui. Souvent, quand je le croisais, il promenait son chien en sifflotant ou en fumant une clope — un autre attribut de sa coolitude, il faut l'avouer —, et ça me mettait de bonne humeur de le voir, juste le voir être souriant et de bonne humeur lui aussi. Chaque fois que je le rencontrais, je ne manquais pas de lui dire bonjour, et il me répondait en tournant toujours la tête au bon endroit. Il ne semblait par ailleurs jamais handicapé par sa cécité, ce qui le rendait d'autant plus admirable à mes yeux, sans jamais trébucher ni être hésitant dans ses gestes, trouvant sa boîte aux lettres avec aisance en comptant le nombre de boîtes aux lettres à partir de la droite, et prenant toujours les escaliers pour monter les étages. A ce stade de mon portrait, je dois avouer que même si je prenais toujours soin de l'observer avec attention, je ne savais pas grand-chose de lui : il avait un jeune frère maigrelet que j'avais dû croiser une fois ou deux, sa boîte aux lettres portait le numéro 93, il vivait au troisième étage. Et son chien s'appelait Hugo.

     Je savais le prénom de son chien parce que je le lui avais demandé, une fois. Il avait un beau chien, un grand labrador noir aux yeux pétillant et à l'air adorable, dont j'étais sûre que tous les enfants de l'immeuble devaient être fan, et qui m'avait même séduite. Il me faisait penser à l'image que je me faisais de Patmol dans Harry Potter, et surtout, il était parfaitement assorti avec son maître : démarche vive chez l'un et décontractée chez l'autre, poil brillant chez l'un, nonchalance chez l'autre. Même aura, même coolitude. Un jour que je les avais croisés tous deux dans le hall de l'entrée, j'avais dit bonjour à l'un, j'avais caressé l'autre... Puis, au moment où je repartais, sur une impulsion, je m'étais retournée, j'avais fait demi-tour et, sans trop réfléchir, je lui avais demandé comment s'appelait son chien. Je lui ai demandé un peu comme j'avais posé la même question au mendiant, sans m'accroupir cette fois-ci, mais un peu maladroitement, sûrement, de façon précipitée, vite, avant de ne plus oser. (Demander son prénom, c'était ma façon de les traiter comme de vraies personnes, de les sortir de l'anonymat des noms communs dans ma tête. C'était important, pour moi.) Je lui ai demandé, donc, et de sa voix tranquille, sans s'étonner, il m'a dit que son chien s'appelait Hugo. Alors, j'ai dû bafouiller quelque chose comme D'accord, merci, et puis je suis repartie. Ce n'est que dans l'ascenseur que j'ai réalisé que je ne lui avais pas demandé son prénom, à lui.

     Je n'ai jamais eu l'occasion de lui demander son prénom. Chaque fois que j'y repensais, j'étais terriblement gênée de me dire que j'avais demandé le prénom de son chien, et que je n'avais même pas pris la peine, même pas pensé à lui demander son propre prénom. Mais je n'ai jamais eu l'occasion de me rattraper soit que je ne l'aie plus recroisé que rapidement, soit qu'il ait été en train de parler à d'autres gens, soit que j'aie oublié, par la suite, et puis il fallait aussi ajouter que je ne le croisais que rarement. Il est donc resté l'aveugle, dans ma tête, mais pas n'importe lequel, l'Aveugle, le modèle. Celui dont j'aurais peut-être aimé avoir l'aura, celui dont, c'était certain, je voulais m'inspirer pour faire les personnages de mes sagas. Je voulais attraper cette coolitude, je voulais la transposer dans mes imaginaires. Parce que ça me mettait de bonne humeur, rien que de penser à lui.

     

     Et puis un jour, alors que je rentrais chez moi avec mes parents, nous avons vu des tâches de sang dans le hall de l'entrée. C'était un filet très mince de gouttelettes brunes qui avaient descendu les escaliers de façon sporadique, et qui avaient séché sur le sol : rien de spectaculaire en vérité, c'étaient même des tâches plutôt insignifiantes, et je n'y aurais sans doute pas prêté attention si on ne m'avait pas dit que c'était du sang. Il s'est avéré plus tard qu'il s'agissait du sang du jeune frère de mon aveugle, le maigrelet. Il se faisait souvent battre par son grand frère chez qui il habitait, alors, parfois, quand les coups devenaient trop violents, il allait se réfugier dans la cave de l'immeuble, parce que là au moins il pouvait dormir tranquille.

     Les tâches de sang ont fait scandale, et ils ont fini par partir, tous les deux. J'ai appris un peu après que l'aveugle avait été marié, autrefois. Il avait eu une femme, qu'il avait aussi battue, paraît-il. Elle l'avait quitté le jour où il lui avait cassé le poignet.

     Parfois, je repense à ce jeune frère maigrelet, auquel je n'avais jamais vraiment prêté attention, sinon pour le trouver cool par déteinte, moins charismatique que son grand frère, quand même. Il avait à peine plus que mon âge, je crois. Parfois je me demande ce qu'il serait advenu si je l'avais rencontré ce que j'aurais connu de lui si je l'avais connu. Parfois je me demande ce qu'il devient aussi. S'il continue de s'enfuir dans les caves des immeubles pour échapper aux coups, ou s'il est heureux. Ou peut-être les deux, si c'est possible.

     Mais le plus souvent, c'est à l'Aveugle que je repense. Je repense à lui, et je repense à ce que j'ai appris de lui, à la fin. Il ne devait sans doute pas avoir une vie facile : on m'a dit que c'était dur, d'être aveugle, que ça pouvait rendre malheureux, que ça pouvait frustrer. Que peut-être que c'était ça qui l'avait rendu violent. Mais je me souviens de l'avoir vu si souriant, si nonchalant, chaque fois que je le croisais.

     Après toutes ces années, ça ne me fait plus sourire de penser à lui : et pourtant, chaque fois que je pense à lui, je ne peux pas m'en empêcher, je vois le type détendu et enjoué, et je me souviens que je le trouvais cool.


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  •  Car même lui n'est pas si pur qu'un coup de crayon ne fasse apparaître son doux grain.

     

    Comme un coup de crayon nuageux dans le ciel

     


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  •  Depuis des années que je vais au Salon du Livre et de la Presse Jeunesse (vous savez, celui de Montreuil, qui se tient annuellement fin novembre ou début décembre, quand vous commencez à faire vos emplettes de Noël...), j'ai progressivement cessé d'y aller pour acheter les livres que je voulais lire, et j'ai rapidement commencé à y aller simplement pour le plaisir de regarder des livres que je n'avais pas (plus) l'habitude de fréquenter. Ce passage de la littérature jeunesse plutôt axée adolescents à une littérature jeunesse classée 0-3 ans, à rebours de ma propre croissance, n'a été en rien une régression, et bien au contraire, il a guidé (et été guidé par) un regard nouveau sur la littérature et l'objet que constitue le livre en général : et c'est justement ce regard nouveau que j'ai appris à porter sur les livres et la littérature que j'aimerais partager ici (du moins en partie, puisque pour cet article je vais me limiter aux livres pour enfants).

     Note : quand je parle de livre pour enfants, dans mon article, je fais bel et bien référence à cette littérature jeunesse classée 0-3 ans, même si bien sûr certains propos valent aussi pour le reste de la littérature jeunesse ou de la littérature tout court : il s'agit ici de remarques générales qui ne valent pas non plus pour tous les livres pour enfants !

     

     Il faut dire que la littérature jeunesse tient une place particulière dans la littérature... Du moins lorsqu'on considère qu'elle fait partie intégrante de la littérature, ce qui est loin d'être acquis. Et pour cause : on soupçonne la littérature jeunesse, puisqu'elle s'adresse à des personnes immatures (au sens propre du terme), d'être elle-même immature, diminuée du plein potentiel de la littérature, d'être par conséquent une sous-littérature (!). Face à ces accusations, on aurait envie de répliquer que comme pour toute littérature, la littérature jeunesse se compose de bons livres comme de mauvais, et que les gens propices à penser que la littérature jeunesse s'adresse à des êtres immatures seraient les plus aptes à en écrire les mauvais livres – mais l'art de la réplique n'est pas ce qui nous intéresse ici.

     Les détracteurs de la littérature jeunesse ajouteront aussi que les livres pour enfants (cette fois-ci eux plus spécifiquement) sont surtout composés d'images, et qu'à ce titre ils ne peuvent prétendre être réellement de la littérature. Ciel, des images, et pourquoi pas des dialogues, tant qu'on y est ? Allant dans le sens contraire d'Alice, on pourrait bien se demander à quoi peut bien servir un livre où il y a des images et des dialogues... On frôle ici le débat sur le statut des bandes-dessinées (qui, elles, peuvent se rattraper en faisant valoir que certaines d'entre elles sont à destination des adultes : ouf), qui, bien qu'intéressant, n'est toujours pas notre sujet... Mais si j'ai tenu à faire une petite digressions sur les critiques des mauvaises langues, c'est que justement les livres pour enfants sont souvent déconsidérés à ces égards (et leurs lecteurs sont souvent bien trop jeunes pour défendre leur littérature !), et que je me suis donc donné la charge de donner quelques arguments à leur réhabilitation (non sans le sentiment d'avoir à statuer l'évidence, mais à ce qu'il paraît, on ne la répète jamais assez).

     

     Vers 14 ou 15 ans, j'ai donc commencé à cesser de fréquenter le Salon du Livre et de la Presse Jeunesse (appelons-le le SLPJ) pour sa littérature adolescente, et j'ai commencé à le fréquenter pour ses éditeurs. Travailler dans le monde de l'édition était alors mon ambition (elle l'est toujours, mais elle côtoie désormais d'autres rêves), et j'aimais bien discuter avec eux pour en apprendre plus sur leurs lignes éditoriales, leurs choix, leurs parcours : et c'est là que j'ai commencé à m'intéresser vraiment au livre en tant qu'objet. Jusqu'alors, j'entretenais avec les livres un rapport de consommatrice : je les achetais ou les empruntais, je les lisais, les relisais, ça s'arrêtait là. Le livre était un support du texte (la seule chose pour laquelle j'avais de la considération), sans plus. Mais lorsqu'on se penche sur la conception d'un livre, on découvre alors qu'il y a bien plus que le texte : au-delà du choix du texte et du travail marketing autour, comment va-t-on présenter le texte ? Quelles illustrations, s'il y en a ? Quel choix de papier ? Quel choix de couverture ?

     Pour la plupart des livres, la question est importante pour l'éditeur qui les conçoit ; mais pour les livres pour enfants, cette question est essentielle. Là, le livre n'est pas là seulement pour être vu, il est aussi là pour être touché, et à cet égard, les éditeurs les plus attentionnés choisissent souvent des papiers un peu originaux, loin du classique papier glacé. La technique d'impression est aussi choisie avec soin, comme la sérigraphie ou l'aquatinte, afin de mieux faire ressortir les couleurs, voire, pour certains exemplaires de livre, faire sentir légèrement les couleurs : c'est le cas de quelques livres traduits du coréen que j'ai eu l'occasion de feuilleter sur le stand de la librairie des Trois Ourses, une librairie spécialisée dans les beaux livres pour enfants. Non seulement le papier était très doux, presque du tissu, mais en plus chaque couleur avait été imprimée et vernie tour à tour, ce qui faisait qu'au toucher on pouvait deviner un léger changement d'épaisseur entre les différentes couleurs. (Je ne sais pas si ces livres sont encore dans leur catalogue (ils étaient tirés en série limitée et soigneusement numérotés), mais si par hasard vous vous retrouvez au SLPJ l'année prochaine, faites un tour sur leur stand, vous n'aurez que des belles surprises.)

     C'est toutefois un euphémisme que de prétendre, comme je l'ai fait plus haut, que les livres pour enfants sont faits pour être touchés : leur lectorat n'a pas seulement l'intention de les toucher, mais aussi de les manipuler (voire plus que les manipuler ; mais il ne faut pas s'en formaliser, car c'est le destin des livres que de s'abîmer un peu un jour ou l'autre : et mieux vaut un livre qui a vécu et s'est un peu abîmé qu'un livre qui n'a jamais été ouvert). Certains éditeurs et auteurs prennent le défi au pied de la lettre, avec des livres à plusieurs volets formant diverses créatures ou histoires (je pense notamment à un livre de Frédéric Forte dont je n'arrive pas à retrouver le titre ; je le remettrai ici si ça me revient), ou bien avec des languettes à tirer, des fenêtres à (déc)ouvrir, des textures nouvelles qui se révèlent (un grand classique dans les livres d'animaux), des découpages... Voire des illustrations qui se lèvent soudain pour faire des livres pop-up (comme le livre pop-up Kandinsky), ou bien des ombres chinoises ! Tout le potentiel du livre en tant qu'objet est exploité, de façon qui relève parfois du génie, en tous cas souvent de l'art : et le livre pour enfants devient ainsi une véritable invitation à (re)découvrir l'objet qu'est le livre, à (re)découvrir le papier, les formes, les couleurs, le sensations, et tous les jaillissements que le livre peut contenir.

     

     Car les livres pour enfants, quelle que soit leur conception, sont là pour nourrir leur curiosité... Mais ce sont des livres qui n'en éveillent pas moins la nôtre aussi, comme j'ai pu m'en rendre compte quand j'ai commencé à regarder à nouveau les livres pour enfants : et tout comme c'est toujours amusant de redécouvrir un film ou un dessin animé de notre jeunesse en comprenant cette fois-ci certaines allusions réservées aux grands, de même les bons livres pour enfants ont assez de subtilité(s) pour que chacun (du moins, tout esprit bien disposé) y trouve son compte. Et en première ligne de ces fameuses subtilités, avec les situations faisant appel à la hauteur de vue des adultes (les petites catastrophes qui semblent terribles aux enfants, et risibles aux plus grands), on trouve bien évidemment l'humour, qui peut prendre de nombreuses formes : mais plutôt que de détailler ce point qui vous parle sans doute à tous, je me contenterai plutôt d'illustrer mon propos avec un aperçu des travaux de Gilles Bachelet, dont j'aime énormément les livres, et dont l'approche me fait parfois penser à celle de Claude Ponti (si, vous connaissez cette fois-ci : c'est le fameux auteur-illustrateur de l'Ecole des Loisirs, avec les poussins, qui a fait L'Ile des zertesLe Doudou méchant... : vous aurez beau lire et relire ses livres, regarder ses illustrations et les re-regarder, vous n'arriverez probablement jamais à découvrir tout ce que ses poussins font !). Et comme la subtilité passe souvent par le rapport entre le texte et l'image (ce que le texte dit et que l'image ne dit pas, et ce que l'image dit que le texte ne dit pas), les détracteurs des images peuvent bien se faire remballer : car non, l'image n'est pas là pour compenser une quelconque immaturité intellectuelle des enfants, mais pour faire partie intégrante du livre et créer l'univers avec...

     

     Et la curiosité se nourrit aussi bien des découvertes que les livres pour enfants offrent que des réflexions qui en découlent : d'où les valeurs qu'on peut prêter aux livres pour enfants, mais qu'il faut prêter avec modération. Car un bon livre peut montrer des valeurs ou les défendre (comme par exemple Petit-Bleu et Petit-Jaune de Leo Lionni), mais il n'est pas question de les imposer, comme croient certains livres qu'on qualifierait volontiers de bien-pensants et qui ont plus été conçus pour faire comprendre aux enfants qu'il faut écouter les parents (notons au passage que ces valeurs ne sont pas universelles, puisqu'elles s'adressent aux enfants et seulement à eux) que pour les faire penser réellement... (On pourrait ici aisément en déduire la morale suivante : n'achetez à vos enfants que des livres que vous pourriez lire avec plaisir vous !)

     Aux éternels détracteurs de la littérature jeunesse, qui feront valoir les happy ends comme des marques de sa naïveté, on répliquera avec mauvaise foi que ce n'est pas vrai (après tout, les contes qu'on connaît tous sont bien plus sombres qu'ils n'y paraissent, et nombreux finissent mal : mais ce serait malhonnête de prétendre que ce sont ces versions qu'on raconte à nos enfants...), et, avec plus d'honnêteté, qu'il y a plus de valeurs à transmettre dans une histoire où le courage et la gentillesse rendent le héros heureux que dans une histoire où on finit par se résigner face à un inexpugnable malheur. Les livres pour enfants font bien de nous rappeler qu'on peut toujours trouver le moyen d'être heureux, et qu'il faut croire en soi !

     

     Au-delà de la qualité du livre en tant qu'objet, et au-delà de la curiosité et du plaisir nourris par la (re)lecture, au-delà des valeurs, il y a aussi une quatrième raison pour laquelle je tiens à défendre si ardemment la force des livres pour enfants. Les livres pour enfants ne se justifient et ne s'excusent jamais : ils se contentent de montrer, et libre à nous d'y prendre ce qu'on est prêt à y prendre. Tout devient possible : et dès lors qu'on nous parle de magie, dans un livre pour enfants, la magie existe. Les livres pour enfants ne nous expliquent jamais pourquoi ou comment la magie existe, comment physiquement elle serait possible. Ils ne nous expliquent pas non plus pourquoi le monstre est sous le lit : pour l'enfant, la simple possibilité que le monstre y soit le fait exister.

     Cette façon brute d'exposer les choses, contrairement à ce qu'on pourrait croire, ne fait pas offense à mon esprit cartésien : car il me semble que parfois, il est bon de se laisser aller à croire aux choses sans raison, pour le simple plaisir d'y croire... Ou bien peut-être devrais-je dire plutôt : pour le plaisir de rêver, car chaque chose donnée à voir, en plus de devenir possible, devient aussitôt source d'intérêt : l'événement le plus anodin devient une histoire incroyable dès lors qu'on le raconte, et par là-même une source infinie de rêve. Et au fond, c'est ça, la force des livres pour enfants : ils sont au-dessus de la vie des adultes, et s'ils en méprisent certaines lois, c'est bien pour revenir aux couleurs de la vie, telle qu'on peut la voir quand on a 2 ou 3 ans et qu'on est simplement avide de la croquer sans préjuger. N'était-ce pas Nietzsche qui disait que la métamorphose ultime consistait à devenir enfant ?

     


     

     J'ai choisi de publier cet article dans le cadre d'Eklabugs – si vous ne connaissez pas le projet, je vous invite à aller ici. Si vous voulez aller explorer les articles des autres participants de cette session, vous pouvez donc cliquez sur les liens suivants :

     Et si vous avez le temps pendant vos vacances, pourquoi ne pas nous rejoindre pour la prochaine session ? C'est sans engagement !


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  •  En ces temps de plus en plus ensoleillés (ou du moins pour les chanceux d'entre nous), les envies de vacances se font sentir... Malheureusement, ce n'est pas donné à tous d'avoir la chance de voyager, et c'est pourquoi notre agence DécaféineVoyages a le plaisir de vous proposer une excursion d'une semaine aux États-Unis à prix modique (vous n'aurez que les repas à payer)*. (Eh oui, le titre n'était pas aguicheur gratuitement...)

     Nous avons choisi les États-Unis parce que c'est une destination qui fait couramment rêver, mais aussi parce que ça a été plus facile pour nous de réunir les ressources nécessaire à votre voyage : mais bien entendu, vous pouvez tout à fait réutiliser les techniques de notre agence pour voyager tout à fait autre part, ou même ne participer qu'aux options de notre voyage qui vous intéressent. Le but est de vous dépayser un peu, pas de vous ennuyer !

    *Notre agence étant une agence low-low-low-cost, vous comprendrez que nous ne pouvons pas garantir la qualité de nos service, et aucune plainte ne saurait donner lieu à un remboursement de notre part.

     

     Alors, envie de partir aux États-Unis ? Lisez notre brochure pour savoir en détail comment ça se passe !

     

     

     J-7 : préparation du voyage

     Parce qu'avant de partir quelque part, on se renseigne un peu, vous pouvez investir dans un guide touristique en anglais ou en français, que vous pouvez déjà commencer à lire et à customiser (en entourant les lieux qui vous font le plus rêver ou les activités à faire absolument : par la suite, vous pourrez rajouter des commentaires ou des illustrations en fonction de vos impressions de voyage). Mais si vous avez un petit budget, n'hésitez pas à chercher un guide touristique en ligne ou un blog de voyage qui sera plus personnel. Vous pouvez aussi flâner sur Wikipédia pour en savoir plus sur votre future destination (ici, l'article sur les États-Unis : consultez les rubriques de votre choix, historique, géographique... mais surtout la rubrique culturelle !)

     Pour ma part, je vous redirigerai au moins sur ce quiz de Quizlet pour que vous appreniez à placer les 50 États des États-Unis, ce qui vous aidera à vous situer sur le territoire américain (c'est aussi top pour gagner les parties de baccalauréat, ça vous fait des noms géographiques en V, W...).

     Ne négligez pas non plus les révisions d'anglais, en regardant des séries sous-titrées, en lisant en langue originale, ou en révisant un peu de vocabulaire, selon vos préférences. Mais ne forcez pas non plus trop sur l'apprentissage : n'oubliez pas que la période pré-départ sert aussi surtout à rêver du voyage à venir, alors, ne lisez que ce qui vous intéresse, et n'apprenez que ce qu'il vous amuse d'apprendre !

     

     J-1 : derniers préparatifs

    Assurez-vous d'avoir tout dans votre valise : 7 jours de vêtements d'été (ainsi qu'un ou deux vêtements chauds, au cas où...), vos affaires de toilettes (y compris une serviette, on ne sait jamais), quelques livres pour vous occuper pendant les trajets ou avant de dormir, votre peluche, de quoi écrire et dessiner (pour vous faire des souvenirs, voire un carnet de voyage), une tablette de chocolat (au moins), éventuellement votre portable et un chargeur. Répartissez toutes vos affaires entre un gros sac ou une valise et un petit sac que vous emporterez avec vous dans l'avion. Rappelez-vous que vous n'avez pas le droit de transporter des objets coupants ou du liquide dans votre sac-cabine ! Pour l'argent, ne prenez pas la peine de changer de la monnaie avant de partir, DécaféineVoyages s'en occupera pour vous : en revanche, prenez votre carte bleue, elle pourrait vous être utile.

     Enfin, faites les cent pas dans votre maison et piétinez sur place d'impatience en rêvant au voyage qui vous attend, et n'oubliez pas de défaire et refaire vos bagages 50 fois pour vérifier que vous n'avez rien oublié. Envoyez des messages à tous vos amis pour les prévenir que vous serez probablement injoignable pendant la semaine à venir, et faites-les rêver en leur disant que vous partez aux États-Unis. Mais ne vous couchez pas trop tard, car il vous faudra probablement vous lever tôt le lendemain...

     

     J1 (1/2) : le grand départ

    Rendez-vous à l'aéroport ! Regardez ici l'horaire de départ qui vous arrange depuis l'aéroport de votre choix et vers l'aéroport de New York City. Prévoyez d'arriver plusieurs heures à l'avance, car les aéroports sont en général très grands, et il peut être facile de s'y perdre : en outre, il vous faudra passer par l'enregistrement des bagages et le contrôle de vos billets. Bref, pas question d'arriver à la dernière minute...

     Pour vous rendre à l'aéroport depuis chez vous, DécaféineVoyages vous loue gratuitement une voiture : allez sur Google Maps, entrez votre adresse, puis faites le trajet jusqu'à l'aéroport que vous avez choisi avec Google Street (vous pouvez aussi utiliser Google Street depuis le logiciel de Google Earth : faites selon vos préférences). Pour ceux qui ne savent pas conduire, vous pouvez prendre un taxi DécaféineVoyages : calculez le trajet sur Google Maps, et chronométrez-le. Pendant ce temps-là, vous pouvez déjà entamer un des livres que vous avez emportés avec vous. Si vous avez une liseuse (ou même juste un portable), vous pouvez avoir accès à des centaines de livres dits classiques de toutes époques et pour tous les goûts, en français ou en anglais (eh oui, vous partez dans un pays anglophone, autant en profiter !)...

      Une fois arrivé à l'aéroport,vous devrez traverser plusieurs centaines de mètres de hall avant d'arriver au bon endroit pour l'enregistrement, tout en trimballant vos bagages avec vous. Faites donc au moins dix minutes d'aller-retour dans le couloir de votre maison (et n'hésitez pas à monter et à descendre des escaliers s'il y en a chez vous !). Puis vous pèserez vos bagages grâce à une balance pour vérifier qu'ils sont en règle avec la limite de poids (20kg maximum), avant de les enregistrer afin qu'ils soient mis en soute (c'est-à-dire, dans un recoin de votre chambre ou sous votre lit). Vous patienterez ensuite encore une bonne demi-heure en attendant l'embarquement : ce sera l'occasion de lire (oui, encore !) ou bien de faire de ce genre de jeux qu'on ne fait que dans ces moments-là, ou presque. Si c'est l'heure de manger, grignotez un sandwich ou des croissants que vous aurez achetés au préalable : avant de prendre l'avion, il est souvent de mise de grignoter sur le pouce.

     Enfin, l'heure de l'embarquement arrive : installez-vous bien sur votre chaise de bureau avec un petit cousin et un plaid, et attachez-vous à votre siège à l'aide d'un collant ou d'un pantalon. Vous êtes prêts pour pas moins de 8h de vol : seuls des allers-retours aux toilettes vous seront permis, du reste, pas question de gigoter si vous ne voulez pas embêter vos voisins imaginaires. Avec DécaféineVoyages, c'est placement libre : mettez-vous à côté du hublot si vous le voulez, vous pourrez regarder à loisir la Terre s'éloigner  de vous grâce à Google Earth. Pour ce voyage, vous avez même l'occasion exceptionnelle d'entrer dans le cockpit de l'avion pour jouer à l'apprenti-pilote grâce au simulateur de vol de Google Earth (cliquez pour avoir les explications du pilote).

     Pour ceux qu'un baptême de l'air ne tente pas, profitez-en donc pour vous gaver de films : les avions à long vol comprennent tous un écran par personne, avec un accès garanti à plusieurs centaines de films et séries, et grâce au premier mois gratuit de Netflix (pardon pour ceux qui l'ont déjà consommé, il vous faudra vous recréer un compte ou payer), vous pouvez tout à fait avoir la même chose. Entre chaque film, n'hésitez pas à suivre l'avancée de votre avion (c'est-à-dire de l'avion correspondant au vol que vous aviez choisi) ici pour voir où vous êtes et combien de temps il vous reste avant l'atterrissage.

     Si les films ne vous intéressent pas non plus, essayez donc de lire, écrire, dessiner, dormir... Au choix ! Attention cependant : vous devrez activer le mode Hors-ligne avant le décollage et hormis pour Netflix, Air France et Google Earth, pas le droit à Internet ! (Ni aux cigarettes pour les fumeurs, puisqu'on parle d'interdiction...)

     Comme le vol dure 8h, vous aurez aussi le droit à un ou deux repas (en fonction de l'heure). Faites-vous donc réchauffer le plat surgelé de votre choix, que vous aurez au préalable acheté, et assortissez-le d'un yaourt et de la boisson que vous voulez. Pour le petit-déjeuner, vous pouvez prendre une petite viennoiserie avec une tartine : l'essentiel étant, dans tous les cas, de manger sur un plateau, et assis à votre siège/chaise de bureau.

    Après l'atterrissage de l'avion (que vous aurez vous-même conduit... ou non), il est temps de sortir de l'avion et de passer la douane. Vous pouvez donc compter au moins 10 minutes à faire la queue en piétinant sur place et à râler parce que les voyages ne sont pas si reposants que ça. On vous demandera aussi de remplir un petit questionnaire pour vérifier que vous n'avez aucune mauvaise intention : vous pouvez le remplir en ligne ici (mais ne validez pas le formulaire, à moins de vraiment aller aux États-Unis*...).

     Si l'attente vous paraît trop longue, ce sera l'occasion pour vous de changer l'heure de vos portables, montres, et autres objets affichant l'heure. Actuellement, dans l’État de New York, il y a 6h de moins qu'en France, mais vérifiez tout de même (je ne sais pas ce qu'il en est pendant l'heure d'hiver, par exemple). Par la même occasion, fermez tous vos volets : cela vous empêchera de voir la nuit (ou le jour) quand aux États-Unis il est supposé faire jour (ou nuit). En fonction de l'heure, allumez (ou non) la lumière : vous devrez penser à faire cela pendant tout le reste du séjour, n'oubliez pas !

     Ensuite, vous devrez encore attendre 20 minutes avant de récupérer votre valise, que vous trimballerez pendant 10 minutes pour traverser l'aéroport (comprendre : faire 10 minutes d'allers-retours dans votre couloir), avant de prendre un taxi (sur Google Street), et allez de l'aéroport John-F.-Kennedy de New York City pour vous rendre à l'hôtel de votre choix. S'il est encore tôt dans la journée, n'hésitez pas à faire un détour pour vous balader dans la ville (toujours grâce à Google Street). Pour manger, vous pouvez aisément aller à un fast-food américain ou vous faire livrer (KFC (pour Kentucky Fried Chicken, puisque c'est une chaîne originalement fondée dans l’État du Kentucky) fera très bien l'affaire par exemple).

     Pour dormir, entassez, si vous le pouvez, le plus d'oreillers et de couettes possible dans votre lit, afin de simuler le confort presque excessif des lits d'hôtel américains. Vous voilà enfin aux États-Unis !

     

    * Par ailleurs, je vous ai mis ici le lien d'un formulaire facile à remplir, mais sachez que si vous allez vraiment aux États-Unis, il est plus que conseillé d'aller sur un site officiel pour remplir ce genre de formalités.

     

     J2 : visite de New York City (1/2)

     Ce matin, il vous faut vous lever tôt ! Pour commencer la journée, ce sera un petit-déjeuner américain classique : des pancakes, avec la garniture de votre choix. Vous pouvez les faire vous-mêmes (exemple d'une recette trouvée sur Internet), ou bien utiliser une préparation presque toute faite (qu'il faut en général compléter avec des œufs avant de cuire), voire acheter des pancakes déjà faits à réchauffer. Pour les accompagner, pensez au sirop d'érable, au coulis de chocolat ou de fruits rouges, au miel, à la confiture, à la crème de marron, au beurre de cacahuètes, au caramel, aux pépites de chocolats, aux morceaux de fruits, à la crème chantilly... Mais il n'y a pas que le sucré, et les audacieux penseront aussi au bacon, aux saucisses, aux haricots, aux galettes de pommes de terre, au ketchup et autres réjouissances. Comme boisson, faites selon vos envies : thé, café, chocolat chaud, jus de fruits...

     Enfin, préparez-vous, et c'est parti pour une première visite de New York City ! Si vous êtes flemmards, installez-vous juste à votre bureau et lancez Google Maps (je suppose que maintenant, vous commencez à comprendre le procédé...). Si vous êtes plus courageux, vous pouvez mettre votre ordinateur plus en hauteur, et marcher sur place dans votre chambre en même temps que vous avancez sur Google Street.

    Vous pouvez commencer par déambuler à Washington Square, avant de vous diriger vers le World Trade Center en passant par Greenwich Village (prenez l'avenue de Washington Pl, puis la Christopher Street jusqu'à la West Street qui vous fera presque longer le fleuve). N'hésitez pas à vous arrêter aux endroits qui vous semblent jolis, Google Street vous permet parfois d'avoir accès des panoramas de qualité (vous pouvez ainsi avoir une vue à 360°C du Mémorial sur le World Trade Center). Si cela vous intéresse, vous pouvez aussi visiter le musée du World Trade Center. Le Ground Zero, tel qu'on l'appelle depuis la chute des Deux Tours, est un endroit symbolique pour nombreux d'Américains, aussi est-il assez facile d'en trouver des panoramas et photos sur Internet.

     Après cela, vous enchaînez sur un atelier cuisine et vous vous essayez à la confection d'un hamburger américain, avec la garniture de votre choix. (Prenez la recette qui vous fait le plus envie !) Pour le dessert, vous pouvez tenter de cuisiner un cheesecake classique ou bien dans un cheesecake à la new-yorkaise (la différence ne me semble pas tout à fait flagrante, mais n'hésitez pas à consulter la page Wikipédia du cheesecake pour mieux comprendre).

     L'après-midi, prenez le bateau pour vous rendre sur Ellis Island. Vous pouvez faire une visite historique de l'île ou bien juste vous y balader et profiter de la vue. Puis prenez un hélicoptère pour survoler la Statue de la Liberté avant d'atterrir sur Liberty Island où vous pourrez visiter la Statue de la Liberté !

     Enfin, il va être temps de rentrer à l'hôtel. Au menu, ce soir, c'est travers de porc à la sauce barbecue avec du riz ou des pommes de terre sautées, avec les restes du cheesecake du midi. Après ça, si vous n'êtes pas trop fatigués, vous pouvez toujours vous affaler dans votre lit et regarder la télévision américaine (ou des séries sans sous-titre sur Netflix). Mais ne vous couchez pas trop tard non plus, la journée de demain aussi promet d'être longue...

     

     J3 : visite de New York City (2/2)

     Vous commencez la journée sur des donuts, faits maison ou bien achetés (et réchauffés si vous le voulez). Vous pouvez les trancher en deux dans l'épaisseur pour y ajouter de la garniture comme de la pâte à tartiner au chocolat par exemple, ou bien rajouter ladite garniture comme glaçage au-dessus du donut. A accompagner avec la boisson de votre choix, comme d'habitude. Une fois votre petit-déjeuner avalé, vous voilà partis en expédition !

     En taxi ou à pied (vous commencez à comprendre le principe de Google Street...), rendez-vous donc à l'Empire State Building qui vous permettra de bénéficier d'un panorama incroyable sur New York City, comme celui-ci, celui-ci, ou celui-ci. Une fois vos yeux rassasiés, prenez la 34ème Ouest par la gauche, puis tournez à droite sur Broadway : cela vous mènera directement à Time Square que vous pourrez observer sous toutes ses coutures. Pour le déjeuner, dirigez-vous vers le McDonald's de Time Square (eh oui, c'est les vacances, n'espérez pas trop manger sainement cette semaine...). Si vous avez le temps, n'hésitez pas à vous poser sur place pour discuter avec des gens à proximité : c'est l'occasion, si ce n'est de se faire des amis, tout du moins d'améliorer son anglais !

     L'après-midi, repartez sur la 7ème Avenue avant de tourner à droite sur la 54ème Ouest : vous arriverez directement au MoMA, le fameux Modern Museum of Art de New York City, connu dans le monde entier pour la richesse de ses collections. Vous ne pourrez certainement pas tout voir, mais passez au moins par les incontournables, qui comprennent entre autres la Nuit étoilée de Van Gogh et de nombreux Cézanne.

     Si vous vous sentez toujours en forme après le musée, prenez la 54ème Ouest à droite et tournez à gauche sur la 5ème Avenue. Vous passerez ainsi devant la Trump Tower avant de rejoindre Central Park. Vous pouvez y faire une visite touristique, le survoler en hélicoptère ou bien juste vous y promener pour profiter des panoramas.

     Enfin, il va être temps de rentrer. Pour le dîner, afin de boucler la boucle et de faire écho aux donuts du matin, pourquoi pas des bagels ? Encore une fois, faites-les maison si l'envie vous tente, achetez-en des déjà faits si vous avez la flemme, et garnissez-les selon vos desiderata... A déguster dehors avec des inconnus ou bien tranquillement à l'hôtel, selon vos préférences !

     

     J4 : les chutes du Niagara

     Ce matin, accordez-vous une petite grasse matinée si vous le voulez. Au réveil, vous devrez refaire vos bagages, car aujourd'hui, vous quittez New York City ! Après un petit-déjeuner composé de toasts grillés, de pancakes et de donuts (en fonction de ce qu'il vous reste), vous pouvez encore faire un dernier tour à New York City pour profiter des derniers panoramas que vous n'avez pas pu admirer ou bien revoir les endroits que vous avez préférés. Si l'envie vous en dit, accordez-vous même un survol de la ville en hélicoptère : Google Earth vous signale par des petites icônes rouges quelques jolis panoramas (il suffit de cliquer dessus pour y accéder). A midi, achetez-vous (ou cuisinez-vous) un hot-dog plus ou moins classique, puis partez à l'aéroport où vous n'aurez qu'à vous enregistrer et patienter une demi-heure avant l'embarquement (l'hôtel se charge du transfert de vos bagages).

     Après 1h30 de vol (sans films cette fois-ci, vu qu'il s'agit d'un court vol ; mais vous pouvez toujours vous essayer à piloter l'avion si vous le souhaitez), vous arrivez à l'aéroport de Niagara Falls. Vous êtes toujours dans l’État de New York, mais à plus de 500 km de New York City ! Les distances aux États-Unis ne sont pas tout à fait les mêmes qu'en France... Après 30 minutes d'attente et de traversées de couloirs, vous pouvez prendre un taxi pour vous rendre aux chutes du Niagara, qui sont à la frontière américano-canadienne : mais du point de vue américain comme du côté canadien, le panorama est assez impressionnant...

     Après cela, il sera temps de rejoindre un hôtel situé près des chutes du Niagara (celui de votre choix, comme pour les jours précédents). Là, vous pourrez vous reposer en écoutant la radio, puis il sera temps de penser à manger : ce soir, c'est des chicken wings (achetées ou cuisinées) avec des onion rings (eux aussi achetés ou cuisinés) et de la salade, si jamais vous commencez à saturer de gras. Pour le dessert, pourquoi pas essayer un carrot cake ? Enfin, il vous faudra songer à dormir : car vous repartez dès demain matin explorer le reste des États-Unis !

     

     J5 : descendre la côte Est

     Après des muffins faits maison que vous avez dégustés à l'aéroport en attendant pendant 30 minutes votre embarquement (comme hier, l'hôtel gère le transport des bagages, et les vols intra-États-Unis sont toujours plus simples que les vols internationaux), vous embarquez dans un avion en direction de Washington DC (DC pour District of Columbia : on va vers la capitale, pas l’État éponyme des États-Unis). Une fois votre vol (2h) et la période de traversées des couloirs et de passages réglementaires (30 minutes) passés, vous rejoignez un taxi vous emmènera tout droit à la Maison Blanche, dont vous pourrez faire la visite commentée. Sans aller jusqu'à dire que le président vous y a invités personnellement, vous pourrez au moins vous vanter d'y être allés...

     En sortant, vous pouvez flâner dans le parc ou bien le traverser jusqu'au Lincoln Memorial pour en faire la visite. Mais ne traînez pas trop : à partir de midi, vous êtes attendus à l'aéroport. Vous y grignoterez un sandwich avant d'embarquer pour la ville d'Atlanta en Géorgie, qui est un autre État des États-Unis (non, je ne parle pas du pays de l'Europe de l'Est...), plus au sud sur la Côte Est. Une fois les 3h d'avion passées, ainsi que la demi-heure de sortie d'avion/traversées de hall/passeports à valider/etc., vous prenez à nouveau un taxi pour le fameux Aquarium d'Atlanta, qui est le plus grand aquarium du monde. Il est si grand que vous ne pourrez pas tout voir, mais prenez au moins le temps de regarder quelques animaux avant de repartir pour l'hôtel...

     A la fin de cette journée plus qu'épuisante (deux avions et trois visites en un jour, ça commence à faire beaucoup...), vous pouvez tenter un peu de cuisine tex-mex ou carrément mexicaine, soit faite maison, soit avec des préparations presque toutes faites (promis, je ne suis pas rémunérée pour ce placement de produits...). Après cela, zou, au dodo !

     

     J6 : Yellowstone Park

     Cette journée promet d'être aussi fatigante que la précédente, alors pour ce matin, il va vous falloir vous remplir l'estomac : bien que le petit-déjeuner à base d’œufs sur le plat et de bacon soit d'origine britannique, elle est aussi courante aux États-Unis, alors c'est l'occasion de tester ça... Vous pouvez agrémenter le tout de toasts grillés, de haricots, de galettes de pomme de terre, et même de pancakes si le cœur vous en dit. Après cela, rendez-vous à l'aéroport Hartsfield-Jackson d'Atlanta, qui est, tout comme l'Aquarium que vous aviez visité hier, le plus grand du monde. Vous n'imaginiez pas qu'il y ait tant de grandes choses dans un État si peu connu, pas vrai ?

     Comme le fait de connaître les temps d'attente de l'aéroport ne vous dispense pas de les subir, vous patienterez au moins 30 minutes avant d'embarquer à bord de votre avion. Le vol étant censé durer 3h, les plus impatients d'entre vous considéreront qu'ils ont droit à un avion avec films inclus, les autres liront ou dormiront... Vous atterrirez à l'Aéroport de Yellowstone, à la frontière du Montana et de l'Idaho : cette fois-ci, vous êtes bel et bien à l'intérieur des terres, en plein Far-West au nord des États-Unis ! Et en changeant d’État, vous avez aussi changé d'horaire : vous avez 2h de moins que l'heure de New York City, ce qui vous fait 8h de décalage-horaire avec la France...

     Après 30 minutes à piétiner sur place et à traverser des halls, vous pouvez rejoindre une voiture qui vous mènera directement au cœur du Parc National de Yellowstone, dans lequel se trouvent plus de la moitié des geysers de la Terre. Attention aux ours et aux bisons dans le coin, ils peuvent être dangereux pour les touristes, surtout si on s'approche trop près d'eux ou si on laisse traîner de la nourriture : en revanche, ce n'est pas la peine d'acheter une bombe à poivre à 40$, ce n'est en réalité qu'un attrape-touriste.

     Parmi les geysers de Yellowstone, la plupart sont minuscules et inactifs. Mais il y en a qui forment de très beaux bassins dotés de couleurs incroyables et qu'on n'aurait pas osé imaginer soi-même : vous ne pourrez pas vous y baigner, car il s'agit d'eau bouillante avec beaucoup de soufres pour la plupart, mais vous ne manquerez pas de faire un tour dans le parc pour les regarder - ainsi que les paysages qui vont avec, et les animaux qui les habitent, ce qui vous donnera l'occasion de prendre des photos assez remarquables. N'oubliez pas de prendre le temps d'admirer les panoramas aussi... Si vous avez envie d'avoir plus d'information sur ces petits joyaux de la nature, n'hésitez pas à consulter le guide du Parc.

     En parlant du guide du Parc, celui-ci vous sera très utile pour connaître les horaires de jaillissement des geysers : en effet, certains geysers jaillissent à des intervalles très réguliers, ce qui les rend en général prédictibles à 1h près. Le plus connu d'entre eux est le fameux Old Faithful, qui jaillit en moyenne toutes les 90 minutes (avec plus ou moins 10 minutes de variation, ce qui est très peu), et dont le jet peut atteindre jusqu'à 50 mètres de hauteur. Comme il est filmé en permanence par une caméra du Parc de Yellowstone, vous pouvez vous rendre ici pour connaître l'heure de la prochaine éruption... Et surtout, y assister quasiment "en live" !

     Après avoir déjeuné, un peu tardivement, devant Old Faithful, vous reprendrez la voiture pour aller voir un parc voisin, le Grand Teton National Park (non, ne rigolez pas...). Vous aurez moins de temps pour profiter des paysages, qui sont certes un peu moins impressionnants que ceux de Yellowstone, mais si vous avez la chance de croiser des animaux au moment où vous passez, vous ne regretterez pas ; et dans tous les cas, promis, vous aurez de jolies vues !

     Après cela, rendez-vous à votre nouvel hôtel, où vous essayerez un burger à la viande de bison si vous arrivez à vous en procurer, ou un chili con carne si vous préférez rester dans la lignée tex-mex. Si vous n'êtes pas trop fatigués, lancez-vous dans la préparation de cookies pour le dessert : les restes vous serviront de goûter pour les derniers jours...

     

     J7 : dernières découvertes

     Vous démarrez votre dernière journée entière aux États-Unis par un petit-déjeuner avec des œufs brouillés et tout ce que vous avez préféré depuis que vous êtes arrivés : œufs sur le plat, bacon, pancakes, toasts grillés, donuts... Au choix ! Après cela, ça commence à devenir la routine, vous rejoignez l'aéroport le plus proche, qui est désormais celui de Jackson Hole : en attendant l'embarquement, vous pouvez toujours finir les mots croisés ou les sudokus que vous aviez commencés il y a 6 jours, lire, écouter la radio, discuter avec des gens, dormir... En tous cas, il ne faut pas louper l'avion, qui, en 4h, vous conduira directement à l'aéroport du Parc National du Grand Canyon, en Arizona. Après le débarquement, qui comprend comme toujours son lot de traversées de hall et de piétinements sur place, vous vous rendrez tout droit au Grand Canyon, aidés par la brochure du Parc National. Là, vous pourrez vous promener au pied du Canyon, mais aussi le voir avec un peu plus de hauteur, selon vos préférences : mais dans tous les cas, vous devriez apprécier la vue...

     Cependant, vous n'aurez pas tellement le temps de rester plus sur place, car après avoir mangé à un fast-food à proximité (celui que vous préférez : Burger King, KFC, McDonald's, Pizza Hut, Subway...), vous reprendrez l'avion (et les réjouissances qui vont avec : embarquement, débarquement...) pour San Francisco. Là, vous prendrez un taxi jusqu'au Golden Gate Bridge que vous traverserez à pied afin de profiter de la vue panoramique, et si vous avez le temps, vous flânerez un peu dans la ville de San Francisco avant d'aller à votre hôtel juste à côté de l'aéroport. Ce soir, vous pourrez manger ce qu'il vous plaira : soit un des plats que vous aviez testés précédemment et que vous aviez particulièrement apprécié, soit un restaurant qui vous intéresse... Sachant qu'aux États-Unis, on trouve de toutes les gastronomies existantes : pourquoi se limiter aux spécialités américaines, après tout, si quelque chose vous tente plus ?

     Enfin, vous prendrez soin de refaire vos bagages, en prévision du départ de demain. Une semaine, c'était peut-être un peu court, mais combien de choses avez-vous pu voir, tout de même !

     

     J8 : le retour

     Avant de repartir en France (ou quel que soit l'endroit où vous habitez), vous prendrez tout de même un dernier petit-déjeuner américain à base de gaufres et de toutes les garnitures possibles et imaginables (un peu comme pour les pancakes...). Puis vous vérifierez que vous avez bien tous vos bagages, et hop, direction l'aéroport : cette fois-ci, c'est un vol transnational, alors comptez bien plusieurs heures d'attente entre les enregistrements des bagages, ceux des passagers, les passages à la douane, les traversées de hall, etc. Vous en aurez pour 11h de vol, avec films inclus tout de même : pas de quoi râler... Si vous voulez éviter le décalage horaire à l'arrivée, essayez tout de même plutôt de dormir.

     Si les hôtes et hôtesses de l'air passent en vous proposant une boisson, vous pouvez vous lancer dans une dernière expérience gustative et prendre le jus de tomate, qui est bien meilleur que ce dont il a l'air. Enfin, à l'arrivée, après les joies d'un débarquement qui dure encore pas moins d'une heure, vous pourrez rentrer chez vous et... Ouvrir la porte de votre chambre et les volets, remettre vos portables et montres à l'heure, et recommencer à communiquer à votre famille, en revenant enfin dans un monde que vous n'aviez, en réalité, jamais quitté (si ce n'est en esprit) !

     

     J+1 : les souvenirs

     Une fois votre voyage terminé, tout n'est pourtant pas fini : vous pouvez toujours raconter tout ce que vous avez vécu à vos amis (en exagérant au besoin les moments les plus incroyables de votre séjour...), voire même leur offrir des cadeaux en souvenir, comme ce mug tout à fait cliché par exemple... Faites jouer votre imagination, vous pourrez trouver de tout à faire livrer chez vous sur Google. En ce qui concerne les cartes postales, c'est trop bête : pris que vous étiez à voyager, vous aviez oublié de les rédiger... Vous serez donc obligés de les écrire et de les envoyer en France à votre retour, ce qui explique qu'il n'y ait pas de cachet des États-Unis sur le timbre.

     En bon épicurien sachant profiter de la vie, vous aurez des images plein la tête, et sûrement aucune sur votre appareil photo... Mais ce n'est pas grave : car la prochaine fois, si vous partez au Japon, vous aurez sûrement l'occasion de prendre des tonnes de photos de votre peluche là-bas, comme preuve ultime que vous y êtes allés vous-mêmes !

     

     Note : ce voyage a été prévu à bord de Google Chrome, et tout a été optimisé d'après ce navigateur ; cela n'empêche pas d'utiliser un autre navigateur, mais si quelque chose ne fonctionne pas bien, essayez sur Google Chrome avant de râler !

     


     

     J'ai choisi de publier cet article dans le cadre d'Eklabugs – si vous ne connaissez pas le projet, je vous invite à aller ici. Si vous voulez aller explorer les articles des autres participants de cette session, vous pouvez donc cliquez sur les liens suivants :

     


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  • Une tête d'ogre à la calvitie douteuse, un corps de vache rose, et des jambes de Shadock (avec un oeuf en métal qui tombe : PONK !)

     

    Une tête d'éléphant bizarre et un gros corps avec quatre cases à la place du ventre (qui est la localisation du cerveau, comme nous le savons tous), le tout émergeant d'un cactus

     

    Une tête en passoire complexe, un corps de chauve-souris, et des jambes dans un fauteuil roulant

     

    Une tête de bouclé sur un corps de serpent ayant avalé beaucoup de bonhommes (dont un qui crie à l'aide), corps lui-même issu d'un escargot avec sa coquille

     

     

     Cadavres exquis-minute, réalisés un soir d'errances tardives, avec la collaboration d'un certain Monsieur Gaeldr. Remerciements tout particuliers aux Shadocks pour l'inspiration fournie.


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  •   Quand j'étais au lycée, tous les soirs sur le chemin du retour, je croisais un mendiant. C'était toujours le même, avec son franc sourire, son regard vif et son chapeau miteux, toujours assis à la même place sur son sac devant la bouche de métro, à côté de la boulangerie. Il avait une petite barbe, pas rasée mais entretenue quand même, d'un gris qui trahissait son âge avancé, et la saleté aussi, un peu.

     Chaque fois que je le voyais, je lui disais bonjour en souriant, et il me répondait par un même grand sourire, il hochait la tête, levait son chapeau à mon encontre ou me faisait un signe. Je ne sais pas s'il faisait ça à tout le monde, ou si avec le temps il avait fini par me reconnaître quand je passais, mais j'aimais bien me faire l'illusion que c'était parce qu'il me reconnaissait. Je m'étais attachée à lui et à l'idée de le voir chaque jour, et j'étais déçue quand je m'apercevais qu'il n'était pas là, parti acheter du pain à la boulangerie ou caché quelque part ailleurs. Parfois, il m'arrivait de lui donner une pièce quand j'en avais dans ma poche ; le plus souvent, c'était quand il était parti en laissant son chapeau à sa place que je glissais une pièce dedans.

     Pendant longtemps, je me suis demandé comment il s'appelait. A force de le saluer tous les jours, j'avais fini par le considérer comme un ami, et je trouvais ça dommage de ne pas savoir son prénom. Je crois aussi qu'il y avait quelque chose de dégradant pour lui, un peu comme de l'atteinte à la dignité, de l'appeler le mendiant dans ma tête – de le réduire à ça, alors que j'aurais voulu le traiter comme une personne. Un certain nombre de fois, j'ai voulu lui demander comment il s'appelait, un certain nombre de fois j'ai même été sur le point de le faire, mais je ne sais pas pourquoi, je m'arrêtais au dernier moment, je n'osais pas. C'était terriblement bête de ne pas oser, car après tout ça ne coûtait rien, et même au contraire, je sentais que je me devais de lui demander, ne serait-ce que pour réellement le traiter comme un égal, comme je le voulais, ou pour engager un dialogue amical. Mais non, je ne sais pas pourquoi, je n'osais pas ; et chaque fois, je m'en voulais un peu de ne pas avoir osé, en me promettant de vraiment le faire la fois suivante – chose que je ne faisais finalement jamais.

     Et puis un jour, j'ai osé. Je l'ai fait. Je suis passée devant lui, comme à l'habitude, et je l'ai salué en souriant, et il a levé son chapeau vers moi en souriant aussi. J'ai voulu continuer mon chemin comme je le faisais tous les jours, mais trois pas plus tard, je me suis arrêtée et je me suis dit que j'aurais dû lui demander. Je ne sais pas tout à fait pourquoi ce jour-là je me suis arrêtée au lieu de continuer mon chemin, pourquoi ce jour-là j'ai osé alors que je n'avais jamais réussi à oser ; peut-être que c'était cette pensée implacable que si tu ne le fais pas aujourd'hui, tu ne le feras jamais, ou peut-être la voix du défi dans ma tête – bah alors, tu n'es pas cap ? –, mais toujours est-il que ce jour-là, je me suis arrêtée, et j'ai fait demi-tour. Je suis retournée vers lui en courant presque, je me suis baissée pour me mettre à sa hauteur, et puis j'ai demandé, un peu maladroitement : « Euh... En fait... Je me demandais... Vous vous appelez comment ? » Je n'étais pas tout à fait à l'aise, je me sentais un peu intrusive, d'un coup – socialement, c'était peut-être trop inhabituel de demander son prénom à un mendiant. Il m'a souri, il m'a regardée et il m'a répondu quelque chose que je n'ai pas compris. Je me suis donc tout à fait accroupie et je me suis penchée vers lui, et j'ai répété la question, mais c'était encore quelque chose de tout à fait inintelligible, quelque chose d'imprononçable, qui tenait plus du gargouillis qu'autre chose. J'étais encore plus mal à l'aise d'un coup, et j'ai retenté une dernière fois, je lui ai demandé de répéter, et il m'a répété la même chose. Impossible de tirer quoi que ce soit de cette réponse. Alors, comme trois fois, c'était trop, j'ai hoché la tête, un peu désemparée, et j'ai dit un grand « Ah, d'accord ! » en souriant, puis je me suis relevée, je lui ai dit au revoir et je suis repartie.

     Je n'ai jamais su son prénom. Je n'ai même jamais su pourquoi je n'avais pas su, pourquoi je n'avais pas compris sa réponse. Peut-être qu'il avait du mal à articuler, peut-être qu'il avait perdu l'habitude de parler, ou peut-être que c'était absolument une autre langue aux sonorités que je ne connaissais pas. Peut-être aussi qu'il ne parlait pas le français, peut-être qu'il n'avait pas compris ma question. Peut-être... Je ne sais pas. Je ne sais pas, je n'ai jamais su. Je n'ai jamais osé aller lui redemander. Je le croise beaucoup moins souvent maintenant, parce que je passe par un autre chemin. Il m'arrive encore de le voir, et je ne manque jamais de le saluer. Il me répond toujours par un grand sourire et en hochant la tête, en levant son chapeau ou en me faisant un signe. Mais chaque fois que je le vois, je pense que j'aurais aimé savoir son prénom, et que je n'ai jamais pu le savoir, et je pense aussi que, plus terrible encore, je lui ai posé la question, et que je n'ai pas compris la réponse.

     Encore maintenant, je me demande comment il s'appelle.


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  •  Toute chose minuscule et insignifiante que je sois au sein de l'univers, il m'arrive parfois d'avoir la prétention de penser que j'aimerais le réinventer, ou bien en changer ne serait-ce qu'un ou deux principes. Je m'imagine ainsi que cela pourrait peut-être le rendre un peu plus étrange ou amusant, voire même plus poétique – un peu plus proche de cette fausse étymologie qu'on pourrait lui inventer si on coupait le mot en deux, uni-vers : et l'univers serait le vers uni, le monostiche dans lequel s'harmoniserait la matière existante, la poésie englobant et liant tout élément...

     

     L'expansion de l'univers, par exemple, est un phénomène qui fait que les objets de l'univers ont tendance à s'éloigner les uns des autres à mesure que l'espace de l'univers gonfle. Cela fait qu'il y a de plus en plus de distance entre nous et les étoiles lointaines, et que donc celles-ci sont difficilement observables – explications techniques : c'est parce que d''une part, leur luminosité est inversement proportionnelle au carré de leur distance (une formule magique qui dit que les étoiles très très loin sont très très très très peu lumineuses), et d'autre part, le phénomène de décalage vers le rouge (promis, ce n'est pas un gros mot) dû à l'expansion de l'univers fait que la lumière émise par certaines galaxies lointaines est invisible pour nous. En très très vulgarisé, j'espère n'offenser aucun cosmologue.

     

     Mais s'il n'y avait pas d'expansion de l'univers, si l'univers restait sagement dans son coin au lieu de grandir à tout va, nous pourrions imaginer qu'il serait possible de voir toujours plus d'étoiles dans notre ciel nocturne. En effet, puisque notre univers a 13,8 milliards d'années, notre horizon est limité à 13,8 milliards d'années-lumière, et nous ne pouvons voir que les étoiles qui se trouvent dans ce rayon-là. Suivant cette logique, plus les années passeraient et plus nous verrions notre ciel se consteller d'étoiles : dans 400 000 milliards d'années, nous pourrions voir toutes les étoiles se situant à moins de 413,8 milliards d'années-lumière de nous, et alors, peut-être que ce jour-là il y aurait tellement d'étoiles que le ciel serait blanc la nuit... Le soleil couchant ne laisserait plus place alors à l'encre constellée de la nuit, mais peut-être à un éclat diamantin brillant de toute part, ou à un voile blanc et tendre dans lequel on pourrait distinguer quelques points plus lumineux que d'autres... Qui sait ?

     Dans un tel univers, il serait possible de penser que ceux qui croient voir une lumière blanche au seuil de la mort n'auraient en réalité qu'une vision d'un futur lointain où le ciel serait devenu blanc – peut-être la vision de la dernière nuit de l'univers avant sa fin. A la question Pourquoi le ciel est noir la nuit ?, on pourrait répondre que ce n'est que pour garder un peu de place pour les étoiles à venir, et qu'un jour il serait intégralement peuplé par les astres. Peut-être que ce jour-là, lorsque la nuit brillerait de plus de mille feux, les enfants n'auraient plus besoin de veilleuses, et les cauchemars n'existeraient plus. (Peut-être même que ce jour-là les cieux de jour apparaîtraient fades à côté, et qu'on se mettraient à dormir le jour.) Lors des moments moroses de l'existence, on pourrait se dire qu'inévitablement, le ciel est destiné à s'éclaircir. L'expression nuit blanche ne ferait plus penser aux insomnies mais à des cieux lumineux et permanents. On pourrait pointer les étoiles du doigt sans avoir à plaindre leur solitude, car on saurait que d'autres finiraient par venir les rejoindre dans leur petit coin de ciel. Bien évidemment, dans cet univers, le ciel blanc n'appartiendrait qu'à un avenir lointain, à une temporalité inimaginable. Mais le simple fait de pouvoir le situer dans le domaine des possibles, à coup sûr, rendrait la vie lumineuse.

     

     Je n'ai passé que quelques heures de ma vie à contempler cette image de ciel blanc dans ma tête, avant de savoir que l'expansion de l'univers le rendait impossible, mais la vision m'a fascinée – et aujourd'hui encore, alors que je sais qu'elle est impossible, elle continue de me fasciner. Parfois, quand j'y repense, je me dis que j'aimerais réinventer quelques principes de l'univers, rien que pour la rendre possible... Et je me rappelle que notre univers est déjà doté d'assez bien de poésie pour nous faire rêver (et parfois même imaginer l'impossible), qu'il y a au fond un peu de mauvaise foi à prétendre qu'il manque un ciel blanc à l'univers. Et puis, dans un univers où le ciel serait blanc, combien serions-nous à rêver d'un firmament constellé de seulement quelques étoiles ?

     

     


     

     J'ai choisi de publier cet article dans le cadre d'Eklabugs – si vous ne connaissez pas le projet, je vous invite à aller ici. Voici les liens des autres articles publiés lors de cette session :


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